«Mon avenir était à Yverdon Sport»

Il était l’un des favoris du Stade Municipal, qui adorait ses déboulés côté droit. A 24 ans, Anthony Ciavardini a pourtant décidé de quitter Yverdon cet été, après avoir connu plusieurs hauts et bas. Arrivé en Challenge League, pendant l’hiver, il a flambé durant un tour, mais YS est tout de même tombé en 1re ligue. La saison suivante a été celle de la remontée immédiate, mais la 1re ligue Promotion a été un véritable cauchemar. Deux saisons et demi contrastées et fortes en émotions pour ce vrai Yverdonnois. Depuis quelques semaines, il joue à Bulle, loin de chez lui.

Pour mieux revenir par la suite? Rien n’est moins sûr. Plusieurs événements l’ont blessé et, même si tout a changé depuis quelques semaines à Yverdon, son « exil » bullois lui fait du bien au moral. Le temps se chargera de cicatriser les plaies… Il s’explique sur les vraies raisons de son départ, pour la première fois, alors que le FC Bulle va accueillir YS, ce samedi 5 octobre à 17h, à Bouleyres.

Anthony Ciavardini, comment se sont passés vos débuts avec votre nouvelle équipe?

Bien, merci! Personnellement, j’ai connu un début de championnat difficile, puisque je me suis blessé dès mon arrivée, une déchirure à la cuisse. Mais là, c’est bon, j’ai repris le rythme et j’enchaîne les titularisations.

Comment vous-êtes vous intégré à votre nouvelle équipe?

Sans problème. Il y a une bonne ambiance, vraiment. Il y a de l’envie ici, on a un groupe avec un bon caractère. Personnellement, je joue latéral droit, ce qui me convient bien.

Le FC Bulle est actuellement dernier, et, donc, relégable. Ce n’était pas forcément le début espéré…

On est déçus en terme de points, mais pas forcément au niveau du jeu. Franchement, nous ne sommes pas à notre place. Contre Bavois, on n’aurait jamais dû perdre. Contre Naters non plus. Sincèrement, on devrait être plus haut au classement. Mais on manque de rigueur défensive, on n’arrive pas être à 100% pendant 90 minutes. Et on a un peu de poisse offensivement. Dans la jouerie, pourtant, on est bons. On est de mieux en mieux, même, et je suis sûr que les points vont arriver très vite.

Expliquez-nous ce choix de rejoindre la Gruyère. Vous vous étiez entraîné avec Bavois cet été, aviez même joué un match amical à Payerne… et vous voilà à Bulle!

Si je suis parti là-bas, c’est pour complètement changer d’air. J’avais vécu quelque chose de… quel mot choisir? Quelque chose d’horrible, disons-le, avec Yverdon Sport. Je voulais découvrir autre chose, un autre horizon. J’avais trois possibilités: Nyon, en 1re ligue Promotion, Bavois et Bulle. Avec Nyon, les discussions se sont interrompues, car ils attendaient un sponsor qui n’est pas venu, ce qui ne leur permettait pas de prendre un joueur supplémentaire. C’est ce qu’ils m’ont expliqué. Il restait donc Bavois et Bulle, et j’ai choisi Bulle pour vivre une nouvelle aventure. A Bavois, je connaissais tout le monde, cela n’aurait pas été le même bol d’air frais qu’en Gruyère.

Pensez-vous avoir moins de pression là-bas?

Oui, d’une certaine manière. Le public ne me connaît pas, et je ne connais personne. On n’attend pas grand-chose de moi, sauf l’entraîneur. Lui sait ce dont je suis capable et lui me met la pression. J’apprécie assez cette manière de fonctionner.

Le public vous a-t-il bien accueilli, justement?

Quand on perd, personne n’est content, c’est normal. Mais bon, ça va vite tourner.

Est-ce vous qui avez contacté le FC Bulle ou eux qui ont fait le forcing pour vous avoir?

Eux. En fait, j’étais en contact avec Hervé Bochud dans le cadre de la SAFP, le syndicat des joueurs. Mais lui n’a pas arrêté de me parler du FC Bulle, qu’il voulait me faire venir. Il m’a appelé depuis le mois de mai, mais je ne donnais pas suite.

Pourquoi?

Parce que je voulais rester à YS, je ne me voyais pas aller ailleurs. Dans ma tête, c’était clair, mon avenir était à Yverdon, chez moi.

Pourquoi être parti, alors?

Mais parce qu’on m’a poussé dehors!

Qu’est-ce que cela veut dire « poussé dehors »?

Ecoutez, Yverdon Sport, c’est mon club de coeur, c’est ma ville, c’est ma maison. Mais on m’a fait comprendre que je n’étais plus nécessaire à ce club. On m’a fait sentir que l’on ne comptait plus vraiment sur moi.

Mais à quel niveau?

Le problème était surtout financier. Je m’explique: je n’étais pas à Yverdon pour l’argent, vous l’avez bien compris. Mais il y a eu trop de choses. J’avais un contrat, que j’avais signé alors que le club était en Challenge League. Nous avons été relégué en 1re ligue Classic, et Jean-Claude Tétaz est arrivé comme président. Il a gardé mon contrat tel quel. Quand Jacky Pittet a pris la présidence, il m’a demandé de baisser mon contrat et de ne plus toucher que 33% de celui-ci. J’ai accepté. Je n’ai pas bronché, ce qui prouve bien que je ne faisais pas de mon attachement à YS une affaire d’argent. Pendant six mois, j’ai touché 1/3 de mon ancien contrat et j’ai couru la même chose sur le terrain, je me suis défoncé pour ce maillot.

Et alors?

Et alors, cet été, le même Jacky Pittet m’a demandé de baisser mon salaire de moitié! Vous n’appelez pas cela se faire pousser dehors, vous?

Nous, on n’en pense rien, on vous écoute…

Bon. A partir de ce moment-là, quand, en plus, on m’en demandait toujours plus à côté, je me suis dit qu’il se moquait de moi. Là, c’était clair, je partais.

Qu’est-ce que ça veut dire, vous en demander « toujours plus à côté »?

Mais parce que je suis d’Yverdon, on me demandait encore plus de sacrifices, notamment financiers, qu’à un joueur venant de l’extérieur. Alors que j’étais un joueur « emblématique » du club. Au bout d’un moment, bon…

Pouvez-vous nous en dire plus?

YS me doit trois mois, voilà. Je ne vais pas en dire plus sur ce sujet.

Suivez-vous encore l’actualité d’Yverdon Sport?

Oui, de près. Je les suis, je les regarde.

Et alors, votre avis sur l’évolution de la situation?

J’ai envie de dire « Enfin! ». La présidence a changé, Jacky Pittet est parti, c’est une très bonne chose. Mais il fallait que ces gens se bougent avant. On entendait que ça bougeait depuis longtemps, mais rien ne se passait. Je pense qu’il a manqué de mouvement au début de l’été. Il y avait moyen de bien mieux préparer cette saison. Quand je vois qu’on veut faire un club régional, il suffit de regarder les feuilles de match pour voir que ce n’est pas le cas.

Estimez-vous que le club va tout de même dans la bonne direction?

Oui et non. Oui, d’un point de vue administratif. J’entends, je lis, je sais que la dette est en train d’être payée. Tant mieux. Mais sur le plan sportif, ce n’est de loin pas ça. Ils produisent du bon jeu, ça c’est sûr. Mais c’est comme l’an dernier: YS accepte trop facilement de perdre des matches. C’est quelque chose à travailler dans la tête. Il faut avoir la volonté de toujours gagner, de renverser la situation, d’inverser la spirale négative. Je peux en parler: le premier match que j’ai gagné en 2013, c’était il y a deux semaines face à Guin!

Mais il y a Vittorio Bevilacqua désormais. La haine de la défaite va vite arriver, vous ne pensez pas?

Vittorio… C’est lui qui m’a lancé en Challenge League, qui m’a replacé en arrière latéral droit, ce qui est aujourd’hui mon poste idéal. C’est un très bon entraîneur, comme je les aime. Il a une forme de folie, il peut aller trop loin, mais il est ultra-passionné. Il a du tempérament, c’est clair, et il peut péter les plombs, mais il est très intelligent.

Vous voyez-vous revenir à Yverdon Sport, maintenant que la présidence a changé?

Ma réponse est claire: j’ai signé un an à Bulle. J’ai envie de bien finir ce premier tour, déjà, et de faire un gros second tour. Mais entre les deux, je vais prendre des vacances qui vont me faire du bien (sourire). Après, Yverdon Sport? S’ils veulent que je revienne, ils devront m’appeler. Ce n’est pas à moi de faire le premier pas.

YS et vous, c’est une belle histoire, tout de même, celle du gamin formé au Stade Municipal, qui part à Lausanne, puis Malley, et ne s’y impose pas. Vous faites six mois de feu avec Baulmes, et explosez en Challenge League devant votre public, comme une revanche. Cette histoire ne peut pas finir comme ça…

Au bout d’un moment, il ne faut pas se leurrer. Si Ciavardini, Esteban Rossé et Yannick Bovay sont partis, c’est qu’il y avait quelque chose de mauvais.

Mais il y a une nouvelle direction…

Je le répète, c’est bien qu’ils soient arrivés, c’est bien qu’il y ait eu une réaction. Mais ils sont arrivés trop tard pour cette saison. Adrian Kunz n’a pas eu confiance, il est parti. Les joueurs que je vous citais aussi. Si cette nouvelle direction était arrivée un mois plus tôt, il y aurait une autre dynamique, je vous promets.

Mais Bulle, c’est loin, non?

Oui, mais j’ai du plaisir à y aller, c’est ce qui compte! Je travaille à Lausanne, à l’EPFL. Je mets 35 minutes pour y aller le soir. Et après l’entraînement, j’appelle des amis… et je suis vite à Yverdon. C’était dur au début, mais c’est un rythme à suivre.

Espérez-vous encore un contrat professionnel, en Challenge League ou ailleurs?

Personne ne tire un trait sur une carrière pro. Les gens qui me connaissent savent les sacrifices que je fais pour le football. J’ai la chance de pouvoir jouer à bon niveau, mais bien sûr que j’aimerais encore pouvoir jouer en 1re ligue Promotion ou en Challenge League. J’ai fait mes preuves dans ces deux ligues.

Travaillez-vous à 100% aujourd’hui?

Oui.

Aller jouer en Challenge League, c’est quitter la Romandie, quasiment à coup sûr, donc votre emploi…

Oui, c’est vrai. Le problème du football romand, c’est la qualité de la formation de la relève. On est à la rue à ce niveau, c’est dommage.

Mais vous-même avez été formé à Team Vaud!

Justement, j’en ai été une des premières victimes, je peux en parler.

Pardon?

Pour moi, la formation Team Vaud est une des raisons pour lesquelles on ne rivalise plus avec les Alémaniques dans ce canton. Le principal défaut, pour moi, est la disparition du sentiment d’appartenance. Yverdon qui bat Lausanne, ce n’est pas rien! Cela participe de la construction d’un jeune footballeur. Maintenant, on veut faire une grande équipe, qui concurrence le FC Bâle. A 15 ans? Pour moi, à 15 ans, ce n’est pas important de battre le FC Bâle. Ce serait mieux de faire progresser les jeunes footballeurs. On n’y arrive pas.

Mais vous-même, avez-vous eu le sentiment d’avoir progressé?

Ma progression, je la dois à mon père, Dominique. C’est lui qui me faisait jouer dans le jardin, répéter les mêmes gestes, travailler. C’est grâce à lui que j’ai pu être le joueur que je suis aujourd’hui. On va reparler du FC Bâle: les joueurs qui sortent sont soit des stars, soit des gars qui iront ensuite en Super League, en Challenge League, voire en 1re ligue Promotion. Regardez les joueurs qui sortent de Team Vaud où ils atterrissent… Moi, pour progresser, j’ai dû partir deux ans à Xamax. Mais j’ai eu de la chance d’avoir mon père, je peux vous l’assurer.

La réaction de Jacky Pittet suite à cette interview est à lire ici.

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