Concordia a réalisé l'impensable miracle

Les dernières minutes de ce barrage n’ont pas été chaudes, elles ont été brûlantes. Alors que Concordia semblait se diriger vers le sauvetage, Donneloye a, enfin, jeté toutes ses forces dans la bataille. Il a fallu attendre que le coup de carrelet soit proche et, pour tout dire, inéluctable, pour que le FCD se rue à l’assaut des buts de Pablo Soutullo. Le gardien de Concordia, un des grands acteurs du sauvetage incroyable de son équipe ce printemps, a alors « fait le boulot », jusqu’à la 93e et au coup de tête victorieux de Dimitri Durussel. S’en sont suivies trois minutes de folie lors desquelles Concordia a eu deux fois l’occasion de tuer le match en contre, sans succès, et lors desquelles Donneloye a eu la balle de 3-3. Mais la dernière frappe de Fabian Dériaz, à dix secondes du coup de sifflet final de M. Tiago Pinto, passait deux bons mètres sur la gauche des buts de Soutullo. Le banc de Concordia pouvait exulter et savourer l’exploit. En une phrase? Concordia s’est sauvé en ayant 4 points à Noël. C’est tout? C’est énorme, inimaginable et pour tout dire, c’était impossible.

Des dynamiques exactement inverses pour les deux équipes

Ce sauvetage est d’autant plus remarquable que le club du Bois-Gentil a démarré le deuxième tour avec une victoire et cinq défaites! C’est à dire que le 4 mai, il y a à peine plus d’un mois, avant d’aller à Assens, Concordia comptait… 7 points! A la fin du championnat, sept matches plus tard, il en comptait 25, mais n’était pas sauvé directement puisque les trois relégués vaudois de 2e inter forçaient Donneloye et Concordia à passer par ce match de la peur. Les deux équipes ne l’abordaient pas tout à fait dans les mêmes dispositions, pour tout dire. Concordia, on l’a dit, avait gagné 6 de ses 7 derniers matches. Donneloye avait fait exactement l’inverse: 6 défaites, puis une victoire face à Baulmes. Une équipe en confiance contre une équipe en crise: le match de barrage avait, semble-t-il, un favori assez logique.

Le « petit supplément d’âme » était lausannois

Mais il convenait de rester prudent. Car un match comme celui-ci n’est facile à négocier pour personne et que, traditionnellement, les équipes « de la campagne » ont un « petit supplément d’âme » sur les formations lausannoises à l’heure de jouer leur survie. Mais là, clairement, ce « petit supplément d’âme » était du côté de Concordia et cela s’est vu d’entrée. Plus volontaires, plus déterminés et, surtout, bien meilleurs dans le jeu, les hommes de Marcos Carballo ont pris d’entrée le jeu à leur compte. Ils ont fait circuler le ballon, et plutôt très bien, grâce notamment à leurs deux milieux défensifs Ettore et Massimiliano Carro. Ceux-ci ont fait parler leur maîtrise et leur science du jeu et ont confisqué le ballon aux Oies. Pendant la première demi-heure, le terrain de Bavois (qui a accueilli environ 250 spectateurs en ce samedi soir) paraissait trop grand pour un FCD dont on ne voyait absolument pas comment il pourrait se créer une chance de marquer.

Malick Gehri, encore et toujours lui

Du côté de Concordia, on l’imaginait assez bien, grâce notamment à la force de frappe de Rigoberto Capitao et à la technique exquise de Malick Gehri. On l’avait déjà mis en lumière la semaine dernière et on est désolé pour sa modestie, mais on va devoir recommencer: en première période, il a été énorme. Positionné milieu gauche, il a mis les défenseurs nord-vaudois au supplice par la qualité de ses crochets et de ses prises de balle. Il a percuté, joué vers l’avant et toujours cherché la faille. Un régal, que n’ont pas manqué de souligner tous les spectateurs « neutres » venus regarder ce match en voisins. Les supporters de Donneloye ont moins apprécié le spectacle, on s’en doute, mais ce joueur-là, durant les 45 premières minutes, a montré toute la différence entre un élément en confiance, lui, et d’autres un peu moins en réussite, tous ses adversaires.

Donneloye en première mi-temps: une occasion, un but

C’est assez logiquement, donc, que Concordia a ouvert la marque, sur un coup-franc d’Ettore Carro. A 20 mètres, côté ouvert, sa frappe précise et puissante, à ras de terre, trompait Damien Gfeller (24e). 1-0 pour les Lausannois! Donneloye, dès lors, semblait sur le point de craquer, mais obtenait un penalty sur une de ses trop rares incursions dans le camp adverse. Une chose est vraie avec le FCD: même quand il ne joue pas bien, il peut compter sur une fulgurance de l’un de ses deux attaquants. Jérôme Thomas et Hervé Vallotton, même s’ils ne jouent pas chacun la meilleure saison de leur carrière, sont des menaces constantes à ce niveau. Ils sont tous les deux capables de gestes de grande classe à tout moment et Vallotton s’est chargé de tout à la 32e, en obtenant un penalty sur une action individuelle bien menée. Flavio Da Silva, le spécialiste, ne tremblait pas et prenait Pablo Soutullo à contrepied. 1-1. Du bon travail.

Concordia reprend l’avantage dans les secondes suivantes

Mais Concordia allait réagir tout de suite et, quasiment sur l’engagement, trouver une nouvelle fois la faille. Sur un ballon en profondeur, Rigoberto Capitao devançait la sortie de Gfeller, qui le percutait indiscutablement ensuite. La balle était perdue, mais M. Tiago Pinto n’hésitait pas et sifflait son deuxième penalty en moins de deux minutes. Sévère? Disons que l’attaquant de Concordia ne pouvait plus marquer, mais qu’il était bien en avance et que le contact était réel. De toute façon, il n’y avait pas lieu de discuter, mais la blessure de Rigoberto Capitao, resté couché plus d’une minute à l’endroit de l’impact, a fait passer beaucoup de temps tout seul à Massimiliano Carro, le tireur désigné du penalty le plus important de la saison. Allait-il trop cogiter? Paniquer? Le pied allait-il trembler? A toutes ces interrogations, le n°23 de Concordia a répondu par une… panenka, qui rentrait tout tranquillement dans le but de Gfeller, parti de l’autre côté. Comme quoi, la pression n’est pas la même pour tout le monde! 2-1 pour Concordia à la pause, un avantage plus que mérité.

Le lob splendide d’Ismaël Rodriguez pour le 3-1

La deuxième période allait commencer par un but magnifique, celui du 3-1, venu du pied d’Ismaël Rodriguez. L’ailier de Concordia exécutait une merveille de lob, à la Gheorghe Hagi pour les puristes, puis se précipitait vers son banc pour fêter cette réussite qui semblait être celle du maintien. Le FC Donneloye, en effet, n’avait encore rien montré jusque là qui puisse faire croire à un possible retour. Mais c’est à ce moment-là, justement, sous l’impulsion de deux nouveaux entrants, Fabian Dériaz et Dimitri Durussel, que la révolte allait commencer à venir. Dès l’heure de jeu, on a senti Donneloye de plus en plus conscient de sa situation et Concordia de moins en moins serein, même avec deux buts d’avance. Marcos Carballo et son staff regardaient le tableau d’affichage toutes les 30 secondes en se demandant comment il était possible que les minutes soient si longues. Il faut dire que les situations chaudes se multipliaient devant le but de Pablo Soutullo, sans que le ballon n’entre au bon endroit (ou au mauvais, suivant le point de vue). Le FC Donneloye, poussé par un public venu en nombre le soutenir, réduisait la marque dans les arrêts de jeu, on l’a dit. Mais il était trop tard et tous les juniors de Concordia venus en ce samedi soir à Bavois pouvaient courir sur le terrain fêter le maintien avec « les grands ». Concordia est revenu de nulle part et a mérité ce sauvetage plus que tout le monde. Marcos Carballo continuera sa mission la saison prochaine à la tête du club du Bois-Gentil et a presque paru étonné qu’on lui pose la question. « Vous croyez quoi? Que mon téléphone sonne 15 fois par semaine? Bien sûr que je vais rester à Concordia. Le président me l’avait d’ailleurs dit: que ce soit en 3e ligue ou en 2e ligue, j’étais confirmé », a-t-il souri après le match, fier du devoir accompli. Il peut l’être.

Donneloye va devoir digérer

Du côté de Donneloye, on n’a pas envie de faire de grandes phrases qui ne serviraient à rien. Mais, dans un match de barrage, si on préférera toujours parler du gagnant, il y a également, bien malheureusement, un perdant. Aujourd’hui, du côté de la Menthue, il faut accepter la défaite et cette relégation inattendue pour un club qui avait retrouvé la 2e ligue à l’été 2012. Deux ans plus tard, il est temps d’y retourner et ce constat est bien malheureux. Espérons simplement que ce club sympathique et important dans le paysage footballistique vaudois puisse rebondir et éviter un départ trop massif de ses cadres. Le comité est actif et compétent et aura à coeur de repartir du bon pied sportivement dans les semaines à venir. Avec un entraîneur comme David Tenthorey, qui a déjà annoncé prendre la succession de Walter Späni, une bonne partie du chemin sera déjà faite.

Ils ont dit à footvaud.ch

Walter Späni (entraîneur de Donneloye)
On s’est mis à jouer trop tard… Notre première mi-temps a été catastrophique et il faut reconnaître que Concordia a mérité sa victoire. Ils ont mieux joué au ballon que nous. On a commencé le match à la 60e, mais il y avait déjà 1-3 au tableau d’affichage.
Massimiliano Carro (milieu de terrain de Concordia)
Comment on se sent après un match comme ça? Fatigué, libéré, euphorique… Quand on a commencé la préparation, avec quatre points au compteur, on se disait qu’on avait une chance, c’est sûr, mais on ne se mettait pas trop de pression. On ne pouvait pas avoir de pression, de toute façon, on partait de tellement loin! Et on a eu la malchance de commencer avec toutes les grosses équipes, donc on ne marquait pas de point, c’était difficile, mais c’était un mal pour un bien, finalement. On voyait qu’on n’était pas tellement loin d’eux et lorsque les équipes plus abordables sont arrivées, avec tout le respect que j’ai pour elles, on a commencé à engranger des points et on a fini par y arriver! C’est incroyable, franchement… Dans les dernières minutes, lorsque Donneloye a failli égaliser, j’ai pris 5 à 10 ans, je vous promets! On est tous très attachés à ce club, qui est vraiment familial. Je ne sais pas exactement comment c’est dans les autres clubs lausannois à l’intérieur, mais chez nous, c’est vrai, il y a de l’amour pour ce club, on ne pouvait pas le laisser tomber. Lorsque le président a contacté les joueurs qui étaient partis pour diverses raisons, ils sont revenus et aujourd’hui on s’est en sortis, tous ensemble. On est content pour ce club, mais aussi pour notre « petit mais grand » président. On est super heureux pour lui, c’est une personne formidable. Mon penalty? Ca m’a beaucoup travaillé depuis 4 ou 5 semaines… En fait, j’ai toujours 2 ou 3 penaltys à tirer par année, mais là, depuis la reprise, aucun! Et j’en ai loupé un en amical en tirant dans un coin, donc je me suis dit: le prochain, tu fais une panenka, quel que soit le match. Et c’est tombé sur aujourd’hui! C’était clair dans ma tête… et c’est passé! Bon, si je l’avais raté, je ne vous en parlerais pas comme ça, c’est sûr (rires).
David Clément (président de Concordia)
Aujourd’hui, c’est comme une montée! C’est le même sentiment, mais c’est aussi et surtout un sacré soulagement. Cela fait huit matches couperet que l’on dispute, lors desquels la défaite était interdite, et on finit par se maintenir! Lorsqu’on prend le 3-2, je vois arriver les prolongations et je me dis: « Non, pas encore, on a assez donné… ». Je pensais vraiment qu’on allait devoir aller au bout du steak, mais on tenu! On s’est sauvés parce qu’il y a des gens qui sont restés, qui ont cru à ce maintien même lorsqu’on avait quatre points, qui se sont investis pour ce club. Et bien sûr, il y a les gars qui sont revenus, Pablo Soutullo, Malick Gehri… Ca se joue à hyper-peu de choses, mais aujourd’hui, il faut qu’on pense à construire l’avenir. Si je fais le bilan de cette saison, je constate que j’ai un peu surestimé l’effectif en début d’année, avec notre entraîneur d’alors Pietro Quagliara. A ce moment-là, il y a des gens qui m’ont dit qu’on allait droit dans le mur, qu’il fallait réagir. Ces gens-là sont mieux placés que moi aujourd’hui pour savoir ce qui est bon pour un club de 2e ligue, j’ai envie d’être réaliste… Dans l’âme, je suis plutôt un président de juniors. Aujourd’hui, il faut trouver quelqu’un qui s’occupe de la première équipe qui soit quelqu’un d’autre que moi. Ce qui s’est passé, c’est un miracle, mais la sonnette d’alarme est tirée. J’aimerais que des gars s’investissent pour ce club et je peux penser, par exemple, à Massimiliano et Ettore Carro. Ils ont des contacts que je n’ai pas, et ils sont attachés à ce club, ils l’ont encore montré ce soir et de fort belle manière. Ils ont des compétences que je n’ai pas. Moi, je voulais absolument qu’on se maintienne cette année. Pour le club et pour nos 400 juniors. La 3e ligue, ce n’est pas une catastrophe, mais la 2e ligue c’est quand même mieux pour nos juniors, c’est une autre motivation. C’est aussi pour eux que je suis très heureux qu’on se soit maintenus. Et sincèrement, est-ce quelqu’un d’autre s’est déjà sauvé, sur le terrain, en ayant 4 points à la trêve?

Le plan-fixe

FC Donneloye – FC Concordia 2-3 (1-2)
Buts: 24e E. Carro 0-1; 32e Flavio Da Silva, pen 1-1; 34e M. Carro, pen. 1-2; 55e Rodriguez 1-3; 93e Durussel 2-3.
Arbitres: M. Tiago Pinto, assisté de M. Abadzic et de M. Hofmann.
Donneloye: Gfeller; Pasche, Flavio Da Silva, Burdet, Stubi; Lambercier (73e Wurlod), Leuenberger (63e Dériaz), Weber, Jäggi (58e Durussel); Thomas, Vallotton.
Entraîneur: Walter Späni.
Concordia: Soutullo; Brugnoni, Greco, Mba, Reis Teixeira; Gehri, E. Carro, M. Carro, El Houss; Rodriguez (73e Gonzalez), Rigoberto Capitao.
Entraîneur: Marcos Carballo.
Notes: Terrain des Peupliers, Bavois.

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